La Nuit Et Autres Nouvelles Fantastiques, Guy De Maupassant | Fayard

Le fantastique se met en place progressivement: l'auteur situe souvent l'action dans un lieu isolé, coupé du monde extérieur: un vieux château, une forêt, un cimetière, une maison à l'écart.... Le moment fantastique par excellence, c'est bien évidemment, le soir, la nuit, le moment où le jour bascule, où tout devient flou et incertain... Un des procédés essentiels de ce registre est la personnification: les objets, les paysages semblent, mystérieusement, dotés de vie, de sentiments, ce qui instaure une inquiétude, un trouble. Dans certains textes, on voit ainsi des "nuages éperdus de peur" s'enfuir sur l'horizon. Le narrateur transfère la peur qu'il éprouve lui-même sur le paysage: on parle, parfois, de paysage-état d'âme. La peur est donc, souvent, une des composantes essentielles du fantastique: le champ lexical de l'angoisse s'amplifie au fil du texte, la peur se fait de plus en plus présente, elle se traduit physiquement par des termes très forts, des hyperboles " tressaillir, terreur profonde, une épouvante, un gémissement de souffrance... " La peur peut transparaître, aussi, dans la syntaxe: phrases nominales, très brèves, exclamations, interrogations.

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Quelle horreur! Je sanglotais, le front sur le sol. J'y restai longtemps, longtemps. Puis je m'aperçus que le soir venait. Alors un désir bizarre, fou, un désir d'amant désespéré s'empara de moi. Je voulus passer la nuit près d'elle, dernière nuit, à pleurer sur sa tombe. Mais on me verrait, on me chasserait. Comment faire? Je fus rusé. Je me levai et me mis à errer dans cette ville des disparus. J'allais, J'allais. Comme elle est petite cette ville à côté de l'autre, celle où l'on vit! Et pourtant comme ils sont plus nombreux que les vivants, ces morts. Il nous faut de hautes maisons, des rues, tant de place, pour les quatre générations qui regardent le jour en même temps, boivent l'eau des sources, le vin des vignes et mangent le pain des plaines. Et pour toutes les générations des morts, pour toute l'échelle de l'humanité descendue jusqu'à nous, presque rien, un champ, presque rien! La terre les reprend, l'oubli les efface. Adieu! Au bout du cimetière habité, j'aperçus tout à coup le cimetière abandonné, celui où les vieux défunts achèvent de se mêler au sol, où les croix elles-mêmes pourrissent, où l'on mettra demain les derniers venus.

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Comme dans tout texte autobiographique, l'auteur utilise parfois du présent d'énonciation, « je ne sais plus «, mais très parcimonieusement (deux fois seulement). Il emploie également à deux reprises du présent de vérité générale, dans la dernière phrase du premier paragraphe ainsi que dans la seconde phrase du troisième, à chaque fois pour traduire une sorte d'impression contemplative, qu'il semble vouloir faire partager au lecteur. D'autre part, il lui permet aussi de suivre assez précisément son itinéraire, en s'appuyant sur des éléments réalistes, des noms propres, un lexique important de la ville, « café «, « théâtre «, « boulevard «, « quartier «, « station «, « avenue «, « becs de gaz «, etc., qui donne un caractère authentique à son récit. Mais c'est sans doute pour faire mieux ressortir le caractère poétique de la ville nocturne. b) une peinture lumineuse et métaphorique: En effet, la perception et la contemplation de cette cité inondée de lumières, suggérée par l'expression « Je m'arrêtai... pour regarder... «, suscitent aussitôt une imagination éblouissante de beauté.
Les champs lexicaux de la lumière et du feu viennent alimenter les nombreuses métaphores et les comparaisons: ainsi des « cafés flamboy[ants] «, de la « barrière du feu de la rampe «, « des arbres phosphorescents «, ou encore des « foyers d'incendie dans les feuillages «. Cette peinture impressionniste, l'auteur emploie l'attribut « peints « dans la fin du second paragraphe, est renforcée par de nombreux adverbes d'intensité, « tant «, répété trois fois ou « si «, qui donnent un caractère hyperbolique à cette description. On découvre alors une ville mythique, miroir du monde et du cosmos, d'où l'évocation des « planètes «, de la « lune «, des astres « ou encore du « ciel «. qu'accompagne un lexique très riche de la hauteur, « là-haut «, « lustres «, « arbres «, « balcons «, « globes «, « becs de gaz «. C'est par ces « correspondances « chères à Baudelaire que Paris devient une myriade de constellations, par l'emploi d'opposition, « depuis les planètes jusqu'aux becs de gaz «, de coordinations, « la haut et dans la ville «, « la longue avenue..., et les astres «, de comparaison, « les globes électriques, pareils à des lunes éclatantes «, de métaphore, « avenue étoilée «.